Du 15 au 16 février 2025, les chefs d’État africains se réuniront à Addis-Abeba pour le 38ᵉ sommet de l’Union africaine (UA). Une rencontre sous haute tension, marquée par la transition à la tête de l’organisation, la crise sécuritaire en Afrique, les tensions entre la RDC et le Rwanda, ainsi que les mutations politiques mondiales.
Une transition à la présidence de l’UA dans un climat de tensions
Ce sommet verra le passage de témoin entre le président mauritanien Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani et son homologue angolais João Lourenço, qui assumera la présidence tournante de l’organisation. Un changement qui intervient alors que l’UA fait face à des défis multiples, allant de l’instabilité politique aux enjeux économiques. Lourenço, connu pour son pragmatisme et sa volonté de promouvoir l’intégration africaine, devra jongler avec des dossiers brûlants nécessitant des décisions fortes et concertées.
Parmi les priorités du mandat angolais figurent la consolidation de la paix et de la sécurité sur le continent, notamment dans les régions en proie aux conflits armés. L’Angola, fort de son rôle diplomatique en Afrique australe, pourrait jouer un rôle clé dans la médiation des crises qui secouent l’Afrique centrale et de l’Est.
Sécurité et gouvernance : l’urgence d’une réponse continentale
L’instabilité sécuritaire demeure l’un des sujets les plus préoccupants pour les dirigeants africains. De la menace terroriste au Sahel aux récentes tensions militaires en Afrique centrale, l’UA doit redéfinir sa stratégie pour garantir la paix et la stabilité. Les récents coups d’État militaires au Mali, au Burkina Faso, en Guinée et au Niger ont également mis en lumière la fragilité des institutions démocratiques sur le continent.
Le sommet abordera la nécessité de renforcer les mécanismes de prévention des conflits et de gestion des transitions politiques. L’enjeu est de taille : comment restaurer la confiance des populations envers les gouvernements et garantir un cadre démocratique stable ? La question de la souveraineté et du rôle des puissances étrangères en Afrique, notamment dans le soutien ou la condamnation des régimes militaires, sera aussi au centre des débats.
La crise RDC-Rwanda : une impasse diplomatique
L’un des points les plus sensibles du sommet reste le conflit persistant entre la République Démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda. Kinshasa accuse Kigali de soutenir les rebelles du M23, une accusation que le gouvernement rwandais rejette. Cette situation a aggravé les tensions régionales et fragilisé la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC), qui tente de jouer un rôle de médiateur sans réel succès.
L’UA sera mise au défi de trouver une solution diplomatique viable pour éviter une escalade militaire qui aurait des conséquences dramatiques sur la stabilité régionale. Des discussions à huis clos entre les présidents Félix Tshisekedi et Paul Kagamé sont attendues, sous l’égide de l’UA et avec l’appui d’acteurs internationaux.
Intégration économique : la ZLECAf à l’épreuve
Sur le plan économique, le sommet mettra en avant la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), un projet phare visant à stimuler le commerce intra-africain. Toutefois, sa mise en œuvre se heurte encore à des obstacles logistiques et bureaucratiques.
Les chefs d’État devront trouver des solutions pour accélérer l’application effective de cet accord, harmoniser les réglementations et faciliter les échanges commerciaux. L’essor économique de l’Afrique repose en grande partie sur cette intégration, qui pourrait réduire la dépendance du continent aux marchés extérieurs.
Donald Trump et la nouvelle donne mondiale
Alors que l’Afrique tente de renforcer son autonomie, la situation politique aux États-Unis pourrait également peser sur les discussions du sommet. Avec un possible retour de Donald Trump à la présidence américaine, les relations entre Washington et le continent pourraient connaître des turbulences.
L’approche protectionniste et imprévisible de l’ancien président américain pourrait remettre en question certains accords commerciaux et programmes d’aide. Les dirigeants africains devront anticiper ces changements et réfléchir à des stratégies pour diversifier leurs partenariats, notamment avec l’Europe, la Chine et d’autres puissances émergentes.
Un sommet décisif pour l’avenir du continent
Ce 38ᵉ sommet de l’Union africaine s’annonce donc crucial. Entre enjeux sécuritaires, défis économiques et mutations géopolitiques, les décisions qui y seront prises auront des répercussions durables sur l’avenir du continent. João Lourenço aura la lourde tâche de diriger une organisation qui doit impérativement renforcer son efficacité pour répondre aux attentes des Africains.
Alors que l’Afrique cherche à s’imposer comme un acteur majeur sur la scène internationale, ce sommet pourrait marquer un tournant dans la gestion des crises et l’affirmation d’une souveraineté continentale plus forte.
Times Infos
Par Cédric Baloch.