À l’approche de l’élection présidentielle américaine de novembre 2024, un duel décisif se dessine entre Donald Trump, ancien président républicain, et Kamala Harris, vice-présidente démocrate. Au-delà des enjeux nationaux, cette élection pourrait remodeler les relations des États-Unis avec le reste du monde, notamment l’Afrique. Dans un contexte de rivalité accrue avec la Chine, cette campagne met en lumière des enjeux géopolitiques complexes pour le continent africain, en particulier autour des droits de douane, des investissements et du renouvellement de l’AGOA en 2025.
L’augmentation des droits de douane sur la Chine : une opportunité pour l’Afrique ?
L’une des principales questions qui émerge de la campagne présidentielle est la volonté des deux candidats de durcir leur politique commerciale envers la Chine. Donald Trump a déjà démontré, durant son mandat de 2016 à 2020, sa détermination à imposer des droits de douane sur les produits chinois dans le but de protéger les industries américaines et réduire le déficit commercial. Kamala Harris, bien qu’appartenant à l’administration Biden, semble-t-elle aussi prête à adopter une approche plus ferme envers la Chine, cherchant à réduire la dépendance américaine vis-à-vis des chaînes d’approvisionnement chinoises.
Cette tension pourrait offrir une opportunité aux pays africains. Si les États-Unis cherchent à diversifier leurs sources d’approvisionnement, l’Afrique, riche en ressources naturelles et dotée d’un potentiel de croissance industriel, pourrait devenir une alternative. En effet, les entreprises américaines, sous pression pour trouver de nouveaux marchés, pourraient se tourner vers le continent africain pour contourner les barrières tarifaires élevées imposées à la Chine.
Cependant, cette opportunité reste conditionnée à la capacité des pays africains à améliorer leurs infrastructures et à attirer les investissements. La Chine, à travers ses projets d’infrastructure massive sous l’initiative « Belt and Road », a déjà une avance significative. Les pays africains devront donc naviguer habilement pour profiter de la rivalité américano-chinoise sans pour autant compromettre leurs liens avec Pékin.
L’AGOA : un pivot dans les relations commerciales entre les États-Unis et l’Afrique
L’African Growth and Opportunity Act (AGOA), un programme qui permet aux pays africains de bénéficier d’un accès en franchise de droits aux marchés américains, est un autre élément clé du débat. Instauré en 2000, l’AGOA a permis à plusieurs pays africains de développer leurs exportations vers les États-Unis, en particulier dans les secteurs textile et agricole. Cependant, ce programme expire en 2025, et son renouvellement est loin d’être garanti.
Pour Donald Trump, qui prône une politique économique protectionniste et l’approche America First, le renouvellement de l’AGOA pourrait être remis en question. Durant son premier mandat, Trump a montré peu d’intérêt pour les programmes d’aide et de développement internationaux. Une réélection pourrait signifier un recul de l’engagement américain envers le continent, avec des conséquences économiques directes pour les exportateurs africains.
Kamala Harris, en revanche, pourrait se montrer plus favorable au renouvellement de l’AGOA. Issue de l’administration Biden, qui a renforcé les liens avec l’Afrique, Harris pourrait pousser pour un engagement accru avec le continent. Toutefois, avec la montée des tensions économiques entre les États-Unis et la Chine, Harris pourrait également chercher à réviser l’AGOA pour orienter davantage les échanges africains vers des partenariats stratégiques et non uniquement commerciaux, notamment dans les domaines de la transition énergétique ou des technologies vertes.
La rivalité sino-américaine en Afrique : un équilibre difficile à maintenir
La Chine est devenue, au fil des décennies, le principal partenaire économique de l’Afrique. Avec plus de 200 milliards de dollars de commerce bilatéral et des investissements massifs dans les infrastructures, Pékin a solidifié sa présence sur le continent. Parallèlement, les États-Unis, bien que toujours influents, peinent à rivaliser avec la dynamique chinoise. Les infrastructures financées par la Chine — des routes, des ponts, des ports, et des centrales électriques — témoignent de son engagement sur le long terme.
Face à cette réalité, l’Afrique se trouve dans une position délicate. Si les États-Unis intensifient leurs efforts pour concurrencer la Chine sur le continent, les pays africains devront faire preuve de diplomatie pour éviter de se retrouver coincés entre deux puissances. Ils doivent préserver leurs relations avec la Chine, tout en explorant de nouvelles opportunités avec les États-Unis, notamment dans des secteurs où la Chine est moins présente, comme la technologie, l’éducation et les énergies renouvelables.
Un président Trump, fort de son discours anti-Chine, pourrait chercher à renforcer cette concurrence, tandis que Harris pourrait tenter de redéfinir les partenariats stratégiques dans un esprit de coopération. Cependant, pour que l’Afrique en tire pleinement parti, elle devra continuer à développer ses institutions, améliorer ses conditions d’investissement et se positionner comme un acteur indépendant dans le jeu géopolitique mondial.
Les enjeux futurs pour l’Afrique : croissance et stratégie
L’avenir de l’Afrique dans ce contexte de rivalité sino-américaine dépendra largement de sa capacité à exploiter les dynamiques économiques globales à son avantage. Si les États-Unis augmentent les droits de douane sur la Chine, cela pourrait ouvrir des débouchés pour les produits africains. Mais pour que le continent bénéficie véritablement de cette situation, il lui faudra investir dans ses infrastructures, renforcer ses industries locales et diversifier ses partenaires commerciaux.
De plus, le renouvellement de l’AGOA sera un test décisif pour l’engagement américain envers l’Afrique. Un maintien de cet accord permettrait aux pays africains de continuer à profiter d’un accès privilégié au marché américain. Dans le cas contraire, ils devront redoubler d’efforts pour établir de nouveaux accords commerciaux, tant avec les États-Unis qu’avec d’autres partenaires internationaux, notamment l’Union européenne et l’Asie.
En conclusion, la présidentielle américaine de 2024 et la rivalité croissante entre les États-Unis et la Chine créent un contexte où l’Afrique peut, si elle joue ses cartes avec précaution, renforcer sa position sur la scène mondiale. Toutefois, cela nécessitera des stratégies économiques solides et une diplomatie subtile pour maximiser les bénéfices de cette compétition entre grandes puissances, tout en évitant d’en subir les contrecoups.
Times Infos
Par Cédric Baloch.