Crise politique au Burkina Faso : Ibrahim Traoré dissout le gouvernement et limoge le Premier Ministre

Le Burkina Faso, déjà fragilisé par une instabilité sécuritaire et politique chronique, est à nouveau plongé dans l’incertitude. Le vendredi 6 décembre 2024, le président de la transition, le capitaine Ibrahim Traoré, a pris une décision radicale : dissoudre le gouvernement et démettre de ses fonctions le Premier ministre Apollinaire Joachim Kyelem de Tambela. Ce remaniement abrupt, annoncé par décret présidentiel, soulève de nombreuses interrogations sur l’avenir de la transition en cours dans ce pays sahélien.

Un remaniement inattendu dans un contexte tendu

Depuis son arrivée au pouvoir en septembre 2022 à la faveur d’un coup d’État, Ibrahim Traoré s’est positionné comme le leader d’une transition ambitieuse, promettant de restaurer la sécurité et la souveraineté nationale dans un pays ravagé par le terrorisme. Cependant, la dissolution du gouvernement intervient dans un contexte marqué par des défis immenses : l’insécurité persistante, des déplacés internes en hausse, et une économie sous pression.

Bien que le décret présidentiel ne fournisse aucune justification officielle, des sources proches du pouvoir évoquent des tensions internes au sein de l’exécutif. Certains observateurs estiment que cette décision pourrait refléter un désaccord profond sur la gestion des affaires publiques ou une volonté du capitaine Traoré de consolider son pouvoir en écartant des figures clés perçues comme des obstacles à ses ambitions.

Un symbole de la fragilité des transitions militaires

Le limogeage d’Apollinaire Joachim Kyelem de Tambela met en lumière les limites des régimes de transition militaire dans des pays comme le Burkina Faso. Initialement accueilli avec espoir par une population désillusionnée par l’incapacité des régimes civils à endiguer la violence jihadiste, le capitaine Traoré est désormais confronté à des attentes croissantes. Sa gestion centralisée et parfois unilatérale des affaires de l’État commence à susciter des critiques, tant sur le plan national qu’international.

La dissolution du gouvernement, bien qu’elle soit un moyen de réorganiser l’exécutif, pourrait aussi exacerber les divisions politiques et sociales. Ce geste, perçu par certains comme une démonstration de force, pourrait entamer la crédibilité de la transition et renforcer l’image d’un pouvoir incapable de maintenir la stabilité interne.

Quels impacts pour la population et la transition ?

Pour les Burkinabè, ce nouvel épisode de turbulences politiques est un rappel amer de l’incapacité des élites à s’unir face aux défis existentiels du pays. Pendant que les luttes de pouvoir se poursuivent au sommet de l’État, les populations des zones rurales continuent de subir les assauts des groupes armés, sans véritable solution en vue. Les déplacés internes, qui dépassent désormais les deux millions, sont parmi les principales victimes de cet immobilisme politique.

Par ailleurs, sur le plan diplomatique, cette décision pourrait accentuer l’isolement du Burkina Faso, déjà critiqué pour ses alliances controversées avec des puissances comme la Russie. L’Union africaine et la CEDEAO surveillent de près cette transition, et un remaniement perçu comme autoritaire pourrait compliquer davantage les relations entre le pays et ses partenaires régionaux.

Un tournant pour Ibrahim Traoré

Ibrahim Traoré se retrouve à un carrefour décisif. Sa capacité à nommer rapidement une nouvelle équipe gouvernementale compétente et à communiquer une vision claire pour le reste de la transition sera essentielle pour maintenir un semblant de stabilité. Sans une feuille de route précise et une inclusion des différentes forces politiques et sociales, le risque d’un effondrement complet de la transition devient réel.

Cette décision marque-t-elle le début d’une réorientation stratégique ou le signe d’un régime en difficulté ? Seul l’avenir dira si Ibrahim Traoré parviendra à transformer cette crise en une opportunité pour redresser son pays ou si ce remaniement précipitera une nouvelle vague d’instabilité. Une chose est sûre : le Burkina Faso ne peut plus se permettre d’être piégé dans une boucle de crises interminables.

Times Infos 

Par Lans Konaté. 

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