Sénégal :Macky Sall, entre turbulences internes et rayonnement international : les deux visages d’un ancien président en reconquête

Alors que son image semble ternie au Sénégal, notamment en raison des tensions politiques survenues en fin de mandat, l’ancien président Macky Sall multiplie les démarches pour restaurer son aura à l’étranger. Entre diplomatie active et bilan économique mis en lumière, il tente de faire oublier les dernières secousses nationales en se repositionnant comme une figure incontournable du leadership africain sur la scène internationale.

Une sortie de scène nationale controversée

La fin du règne de Macky Sall a été marquée par une tempête politique sans précédent. La décision de reporter l’élection présidentielle initialement prévue en février 2024 a suscité une levée de boucliers au sein de l’opinion publique sénégalaise. L’opposition a crié à la dérive autoritaire, tandis que des manifestations de grande ampleur ont éclaté dans les rues de Dakar, jetant un voile sombre sur les dernières semaines de son pouvoir.

La Cour constitutionnelle a finalement annulé le report, rétablissant le calendrier électoral et infligeant ainsi un désaveu cinglant au président sortant. Ce revers institutionnel, associé à des critiques sur les atteintes à la liberté d’expression et les arrestations d’opposants, a durablement écorné l’image d’un homme qui avait longtemps été perçu comme un modèle de stabilité démocratique en Afrique de l’Ouest.

Un bilan économique mis en avant

Pourtant, Macky Sall ne manque pas d’atouts à faire valoir. Sous sa présidence, le Sénégal a connu un essor économique soutenu, marqué par la réalisation de projets d’infrastructure ambitieux. Le Train Express Régional (TER), reliant Dakar à Diamniadio, l’aéroport international Blaise Diagne, ou encore les vastes chantiers du PSE (Plan Sénégal Émergent), sont autant de symboles de la modernisation du pays.

Ces réalisations, bien qu’inégalement perçues au sein de la population, constituent des arguments solides que l’ancien président n’hésite pas à mettre en avant dans ses apparitions internationales. Son objectif est clair : inscrire son nom dans l’histoire comme celui d’un bâtisseur, au-delà des controverses politiques.

Une stratégie de rayonnement diplomatique

Depuis son départ du pouvoir, Macky Sall a intensifié ses activités diplomatiques. L’ancien président, qui a présidé l’Union africaine de 2022 à 2023, continue de s’exprimer sur les grandes questions du continent. Il a notamment plaidé pour une réforme de la gouvernance mondiale, appelant à une place permanente de l’Afrique au Conseil de sécurité de l’ONU et à l’intégration de l’Union africaine dans les grandes instances comme le G20.

Il a également été actif dans les discussions sur la transition énergétique, le développement durable et la lutte contre les inégalités mondiales, intervenant dans des forums prestigieux à Washington, Paris ou Addis-Abeba. Cette posture de « sage africain » lui permet de cultiver un capital diplomatique auprès des chancelleries étrangères et des grandes institutions internationales.

Une double image à assumer

Le contraste est saisissant entre la reconnaissance dont il jouit à l’étranger et la défiance dont il fait l’objet chez lui. Macky Sall semble désormais engagé dans une opération de repositionnement, où l’enjeu est double : conserver une stature d’homme d’État à l’international, tout en préparant peut-être un retour en influence, voire en politique, sur le plan national.

Mais ce pari est risqué. Car au-delà des stratégies de communication, les mémoires collectives restent marquées par la répression des manifestations, les arrestations d’opposants comme Ousmane Sonko, et les soupçons de manipulation du processus électoral.

Un avenir encore incertain

À l’heure où le Sénégal entre dans une nouvelle ère avec un président fraîchement élu, Macky Sall se trouve à la croisée des chemins. Ni totalement évincé de la sphère politique, ni entièrement réhabilité aux yeux de ses concitoyens, il joue sa réputation sur un fil.

Son avenir dépendra sans doute de sa capacité à convaincre que ses erreurs n’effacent pas ses apports, et que son action sur la scène mondiale peut encore bénéficier à l’Afrique dans son ensemble. Pour l’instant, l’histoire retiendra un président aux deux visages : celui d’un bâtisseur salué par l’international, et celui d’un chef d’État contesté par une partie de son peuple.

Times Infos 

Par Mback Ndèye.

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