Depuis son accession à la présidence de la République Démocratique du Congo en janvier 2019, Félix Tshisekedi n’a cessé de naviguer dans des eaux troubles, héritées en grande partie de son prédécesseur, Joseph Kabila. Aujourd’hui, une ombre plane sur son mandat : celle de Kabila, surnommé par certains « le parrain » dans les cercles du pouvoir congolais. Pour beaucoup, le silence de Kabila n’est pas seulement une absence de voix, mais la manifestation d’une influence persistante et inquiétante qui menace la stabilité du régime actuel.
Le spectre d’une alliance dangereuse
Depuis plusieurs mois, Tshisekedi et ses conseillers sont de plus en plus convaincus que Kabila est la « main noire » derrière l’Alliance fleuve Congo (AFC), une plateforme politico-militaire qui rassemble d’anciens responsables politiques et des groupes armés, parmi lesquels les tristement célèbres rebelles du M23. Cette alliance, dirigée par Corneille Nangaa, l’ancien président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), semble avoir pour but ultime de déstabiliser le gouvernement de Tshisekedi et de créer les conditions d’un retour au pouvoir pour les kabilistes.
L’accusation est grave : Kabila, par le biais de l’AFC, serait impliqué dans un projet de déstabilisation de l’État, soutenant indirectement les actions violentes de groupes armés pour affaiblir le régime en place. Tshisekedi, se sentant menacé, a commencé à durcir son discours, affirmant à plusieurs reprises sa volonté de défendre son mandat contre toute forme de subversion.
Tshisekedi dans une position fragile
Cette situation met en lumière la position délicate de Tshisekedi. Malgré ses efforts pour s’affirmer en tant que chef de l’État, son pouvoir reste fragilisé par les tensions internes et les défis sécuritaires. La persistance des groupes armés à l’est du pays, l’influence résiduelle des anciens barons du régime Kabila, et les rumeurs persistantes d’une conspiration à grande échelle exacerbent les divisions au sein du gouvernement et créent un climat d’incertitude.
Tshisekedi, conscient de la précarité de son pouvoir, a renforcé ses alliances à l’intérieur du pays et sur la scène internationale. Il espère ainsi isoler les partisans de Kabila et contenir toute tentative de déstabilisation. Mais ces efforts restent marqués par l’incertitude, notamment en raison du silence assourdissant de Kabila, qui n’a ni confirmé ni infirmé ces accusations.
Le silence stratégique de Joseph Kabila
Le silence de Kabila est en lui-même une stratégie politique redoutable. En ne répondant pas aux attaques verbales et en demeurant discret sur ses intentions, il maintient un flou qui lui permet de rester une figure centrale du paysage politique congolais, sans s’exposer directement. Ce silence pourrait lui donner un avantage tactique, lui permettant de préparer en coulisses un éventuel retour ou de soutenir discrètement ses partisans sans éveiller trop de soupçons immédiats.
Cependant, cette stratégie n’est pas sans risques pour Kabila. En laissant s’accumuler les accusations sans réponse, il pourrait perdre le soutien d’une partie de sa base politique, ou au contraire, pousser Tshisekedi à prendre des mesures plus radicales pour se protéger. Le timing de Kabila pour briser ce silence, s’il choisit de le faire, sera crucial dans les mois à venir.
Un avenir incertain pour la RDC
Le duel entre Félix Tshisekedi et Joseph Kabila, bien que silencieux, est d’une intensité politique sans précédent. La RDC se trouve à un carrefour dangereux où chaque geste, chaque mot ou chaque silence peut avoir des répercussions considérables sur l’avenir du pays. Tshisekedi doit non seulement gérer les défis immédiats de la gouvernance, mais aussi naviguer dans un environnement où la loyauté est fluctuante et les alliances, éphémères.
Face à cette situation complexe, une question brûlante reste en suspens : jusqu’à quand Kabila gardera-t-il le silence, et quelle sera l’étincelle qui déclenchera une nouvelle phase dans cette lutte de pouvoir ? L’avenir politique de la RDC, pour l’instant, reste incertain, avec des acteurs majeurs jouant un jeu d’échecs où chaque mouvement pourrait redéfinir l’équilibre des forces dans le pays.
Times Infos
Par Sébastien Tolo.