Présidentielle en Côte d’Ivoire : Une opposition unie, mais fragilisée par ses divisions internes

À quelques mois de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire, la scène politique s’anime avec la création d’une coalition de l’opposition annoncée le 10 mars. Cette alliance regroupe des figures de poids comme Tidjane Thiam, Charles Blé Goudé et Simone Ehivet Gbagbo. Pourtant, une absence de taille laisse planer le doute sur la solidité de cette union : celle de l’ancien président Laurent Gbagbo. Cette recomposition politique suscite autant d’espoir que de scepticisme, tant les tensions et ambitions personnelles semblent encore peser sur la cohésion de l’opposition.

Un front commun contre Ouattara : opportunité ou nécessité ?

Face au président Alassane Ouattara, dont le parti, le RHDP, détient un appareil d’État puissant et une assise électorale solide, l’opposition n’a d’autre choix que de s’unir pour espérer peser dans le scrutin. La coalition nouvellement formée cherche à capitaliser sur le mécontentement populaire, notamment sur les questions économiques, sociales et sécuritaires qui préoccupent les Ivoiriens.

Tidjane Thiam, ancien banquier d’affaires et technocrate reconnu à l’international, incarne une figure de renouveau et de crédibilité auprès des élites économiques. Charles Blé Goudé, ex-leader des Jeunes Patriotes, tente de se repositionner comme un homme de dialogue après son passage devant la Cour pénale internationale. Simone Gbagbo, quant à elle, représente une frange dure du Gbagboïsme, avec une base militante encore active.

Cependant, cette union est-elle un choix idéologique ou une alliance de circonstance dictée par l’urgence électorale ? L’histoire politique récente de la Côte d’Ivoire a montré que les coalitions de façade ne résistent souvent pas aux tensions internes et aux luttes d’influence.

L’ombre de Laurent Gbagbo : un absent qui divise

L’absence de Laurent Gbagbo à la déclaration de cette coalition est un signal fort. L’ancien président, acquitté par la CPI et revenu en Côte d’Ivoire en 2021, demeure une figure incontournable de l’opposition. Son parti, le PPA-CI, bénéficie d’une base électorale fidèle, mais ses relations avec d’autres figures de l’opposition, notamment Simone Gbagbo et Charles Blé Goudé, restent complexes.

S’il choisit de ne pas adhérer à cette coalition, cela pourrait affaiblir sa dynamique en éclatant l’opposition en plusieurs blocs rivaux. À l’inverse, son entrée tardive dans l’alliance pourrait rebattre les cartes et en faire un acteur clé des négociations internes.

Derrière ces calculs politiques, une question fondamentale demeure : l’opposition ivoirienne est-elle véritablement prête à dépasser les querelles de leadership pour offrir une alternative crédible aux électeurs ?

Les défis d’une opposition en quête de cohésion

Pour que cette coalition ait un impact réel, elle devra surmonter plusieurs obstacles. D’abord, elle devra s’accorder sur un candidat unique, ce qui s’annonce déjà comme un défi de taille. Tidjane Thiam, de par son profil technocratique et son expérience à l’international, semble être un prétendant sérieux. Mais sa faible implantation locale pourrait jouer contre lui face à des figures plus enracinées dans le paysage politique ivoirien.

Ensuite, l’opposition devra convaincre un électorat méfiant, qui a souvent vu ce type d’alliances voler en éclats avant même d’atteindre les urnes. La stabilité de cette coalition dépendra de la capacité de ses leaders à mettre en avant un projet commun plutôt que des ambitions personnelles.

Enfin, la question des moyens et de l’organisation reste cruciale. Face à un pouvoir qui contrôle les institutions et les ressources de l’État, l’opposition devra mobiliser un appareil logistique efficace pour exister dans la campagne.

Une opposition à la croisée des chemins

La création de cette coalition marque une étape importante dans la recomposition du paysage politique ivoirien. Mais son avenir reste incertain, tant les défis sont nombreux. Pour qu’elle devienne une véritable force de changement, ses leaders devront démontrer leur capacité à travailler ensemble et à proposer une alternative crédible aux Ivoiriens.

L’histoire récente du pays nous rappelle que les alliances de circonstance ont souvent débouché sur des désillusions. Reste à voir si cette fois-ci, l’opposition saura tirer les leçons du passé et offrir une véritable alternative politique à la Côte d’Ivoire.

Times Infos 

Par Patrick Kindé 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *