Dans le paysage politique gabonais en pleine transition, les discours et appels au débat ne cessent d’alimenter la tension. Récemment, un enregistrement audio de Bilie-By-Nzé, ancien Premier Ministre, a circulé sur les réseaux sociaux, dans lequel il défie le Président de la Transition ou, à défaut, le coordonnateur de campagne R. Ndong Sima. Une réponse ferme et détaillée de cette dernière éclaire cependant le débat, rappelant l’importance du respect des formes et des protocoles institutionnels. Voici un retour approfondi sur ce bras de fer politique et les subtilités de la réponse de Ndong Sima.
Une invitation informelle qui manque de sérieux
Dans l’audio largement partagé, Bilie-By-Nzé interpelle le Président de la Transition, le Premier Ministre et R. Ndong Sima lui-même, et propose même un autre interlocuteur, Hugues Alexandre Barro Chambrier, au cas où Ndong Sima « aurait peur » de le rencontrer. Cette méthode inhabituelle, passant par les réseaux sociaux, est décrite par Ndong Sima comme une « convocation par voie de réseaux sociaux » visant davantage à générer du bruit médiatique qu’à amorcer un réel débat.
Pour Ndong Sima, un appel de cette importance, s’il avait été sincère, aurait dû être formulé dans une correspondance officielle adressée aux institutions ou aux personnes visées. Ce rappel à la forme n’est pas seulement un reproche formel : il s’agit pour le coordinateur de campagne du OUI de souligner l’importance du respect des procédures, qui sont un socle essentiel de la crédibilité politique. La décision de Bilie-By-Nzé de s’adresser de manière informelle jette, selon Ndong Sima, le discrédit sur la sincérité de sa démarche.
Hiérarchie institutionnelle et protocole : un rappel à l’ordre
Outre l’aspect formel, Ndong Sima met également en avant un élément essentiel de la scène politique : la hiérarchie protocolaire. En tant qu’ancien Premier Ministre, Bilie-By-Nzé possède le statut de ministre d’État, un titre de respect, mais qui reste inférieur à celui de Premier Ministre en fonction, et a fortiori, au Président de la Transition.
Cette clarification, selon Ndong Sima, est fondamentale pour bien cadrer le débat et rappeler que chaque fonction publique répond à une hiérarchie stricte, que ce soit en termes de responsabilités ou de rang protocolaire. Bilie-By-Nzé, en tant qu’ancien chef de gouvernement, pourrait légitimement s’adresser à un ministre en poste, mais pas directement aux plus hauts responsables de la transition, lesquels sont engagés dans des fonctions dépassant celles d’un ministre d’État.
Une réponse ouverte au débat, mais dans un cadre défini
Malgré ses réserves sur le fond et la forme de l’appel de Bilie-By-Nzé, Ndong Sima ne ferme pas la porte à une confrontation d’idées. En tant que coordonnateur national de la campagne pour le OUI, il se dit prêt à débattre avec Bilie-By-Nzé, mais en rappelant que ce dernier devrait, de son côté, s’assurer d’avoir un mandat officiel pour représenter l’opposition en faveur du NON.
En fait, Ndong Sima souligne ici un point central : il ne lui appartient pas de consacrer Bilie-By-Nzé comme chef d’opposition au OUI. Cette nuance est importante, car elle évite d’attribuer une légitimité à Bilie-By-Nzé que ce dernier pourrait chercher à revendiquer sans l’avoir nécessairement. En insistant sur la nécessité de tenir le débat dans un cadre défini et respectueux des statuts, Ndong Sima répond à la tentative de Bilie-By-Nzé de s’imposer comme l’opposant principal tout en gardant une position mesurée.
Politique et communication : les dangers du « buzz »
Dans sa réponse, Ndong Sima n’hésite pas à critiquer la tendance de Bilie-By-Nzé à « s’installer dans la com », privilégiant une communication de masse au détriment des démarches institutionnelles. Ce reproche est révélateur d’une réalité politique contemporaine où le « buzz » médiatique tend parfois à prendre le pas sur les procédures officielles, rendant floue la frontière entre politique et simple stratégie de visibilité.
En dépeignant l’ancien Premier Ministre comme un homme de « parole creuse », Ndong Sima remet en question la sincérité de ses intentions et souligne les risques d’une politique déconnectée des réalités institutionnelles et procédurales. Cette critique sous-entend que les réseaux sociaux, bien qu’utiles pour atteindre un large public, ne peuvent remplacer les échanges politiques formels et la rigueur des institutions.
Une stratégie pour renforcer l’image de la campagne du OUI
Finalement, cette réponse de Ndong Sima peut être perçue comme une stratégie habile pour rehausser l’image de la campagne du OUI en la présentant comme stable, sérieuse et respectueuse des formes. En insistant sur la hiérarchie, les procédures et le cadre institutionnel, Ndong Sima projette une image de rigueur et de solidité, en contraste avec la démarche plus spontanée de Bilie-By-Nzé.
Cet échange met en lumière deux visions opposées : d’un côté, la campagne du OUI qui valorise les normes et le respect des structures établies, et de l’autre, une opposition qui tente d’émerger en contournant les conventions. En s’affirmant disponible pour un débat dans des conditions institutionnelles claires, Ndong Sima confirme la volonté de sa campagne de promouvoir un dialogue structuré et pertinent, loin des simples polémiques médiatiques.
Au-delà du défi, un appel au respect institutionnel
La réponse de Ndong Sima à Bilie-By-Nzé dépasse le simple refus d’un défi informel. Elle s’impose comme un rappel de l’importance du respect des institutions et des protocoles dans un contexte de transition où la stabilité politique est primordiale. Par cette mise au point, Ndong Sima ne se contente pas de répondre à une interpellation : il envoie un message fort, destiné à renforcer la crédibilité de la campagne du OUI tout en rappelant les fondements d’un débat politique sain et constructif.
Times Infos
Par Nancy Nguema.