Gabon : Entre transition militaire et présidentielle, quel avenir pour le CTRI ?

À quelques semaines de l’élection présidentielle du 12 avril 2025, une question brûle toutes les lèvres à Libreville et dans l’ensemble du pays : que deviendra le Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI) après avoir goûté aux délices du pouvoir ? Depuis le 30 août 2023, le régime militaire, mené par le général Brice Clotaire Oligui Nguema, a imposé son tempo à la politique gabonaise, suscitant autant d’espoirs que d’inquiétudes. Mais à l’approche d’un scrutin qui doit marquer le retour à l’ordre constitutionnel, l’incertitude demeure totale quant au rôle futur de l’armée dans la gestion du pays.

Un pouvoir militaire en pleine ascension

Lorsque les militaires ont renversé Ali Bongo Ondimba, ils ont promis une transition pacifique et un retour rapide à un régime démocratique. Plus d’un an plus tard, le constat est tout autre. Sous la direction du général Oligui Nguema, le CTRI a consolidé son emprise sur le pays, remodelant les institutions à son avantage. Une nouvelle constitution adoptée en novembre 2024 a non seulement modifié la durée du mandat présidentiel (désormais fixé à sept ans renouvelable une fois) mais a aussi ouvert la porte à une éventuelle candidature du chef de la transition.

Dans ce contexte, le doute s’installe. Le pouvoir militaire acceptera-t-il de se retirer une fois l’élection passée ? Ou bien assistera-t-on à une « transition perpétuelle », où les acteurs militaires continueront à jouer un rôle clé sous des habits civils ?

Une élection présidentielle sous tension

L’annonce récente d’un nouveau code électoral permettant aux militaires de se présenter à l’élection présidentielle a jeté de l’huile sur le feu. Officiellement, cette mesure vise à garantir une transition inclusive, mais dans les faits, elle semble taillée sur mesure pour légitimer une éventuelle candidature d’Oligui Nguema. Si ce dernier choisit de briguer la magistrature suprême, le scrutin pourrait bien ressembler à une validation populaire du pouvoir militaire plutôt qu’à une véritable alternance démocratique.

De plus, la présence massive de militaires dans les hautes sphères du gouvernement et de l’administration soulève des interrogations sur l’avenir de la gestion de l’État. En cas de victoire du général Nguema, ces hommes en uniforme quitteront-ils leurs postes pour regagner les casernes, ou continueront-ils à exercer une influence discrète mais déterminante sur les affaires du pays ?

Un tournant décisif pour le Gabon

Les Gabonais sont à un moment clé de leur histoire politique. Après plusieurs décennies sous l’hégémonie de la famille Bongo, le coup d’État de 2023 avait suscité un espoir de renouveau démocratique. Mais si l’armée s’accroche au pouvoir sous une autre forme, alors la transition ne sera qu’un simple changement de façade.

L’avenir du CTRI, et plus largement du rôle des militaires en politique, dépendra donc du verdict des urnes et de la capacité des institutions à garantir une élection libre et transparente. Si Oligui Nguema est candidat et qu’il l’emporte, il devra prouver que son engagement pour une transition apaisée n’était pas qu’un discours. Dans le cas contraire, le Gabon risque de voir se perpétuer une gouvernance militaire déguisée en pouvoir civil, compromettant ainsi les espoirs de démocratisation.

Seul le scrutin d’avril 2025 permettra d’y voir plus clair. Mais d’ici là, une interrogation demeure : le Gabon est-il réellement prêt à tourner la page du pouvoir militaire, ou s’apprête-t-il à en écrire un nouveau chapitre sous une autre forme ?

Times Infos 

Par Amir Baron.

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