Le Parti Démocratique Gabonais (PDG) est en pleine tourmente, à quelques semaines de l’élection présidentielle du 12 avril 2025. L’ancien président de la République, Ali Bongo Ondimba, a récemment dénoncé l’irrégularité du dernier congrès du parti, affirmant que la nomination de Blaise Louembè à sa tête s’est faite en violation des textes du PDG. Cette prise de parole révèle non seulement un conflit d’héritage politique, mais aussi une lutte pour le contrôle d’une formation qui fut, durant plusieurs décennies, l’épine dorsale du pouvoir gabonais.
Un congrès controversé et une nomination contestée
Dans une interview accordée à Jeune Afrique, Ali Bongo a fustigé l’organisation d’un congrès sans son aval, alors qu’il s’estime toujours légitime pour diriger le PDG. Selon lui, les statuts du parti stipulent clairement que seul le président en exercice peut convoquer une telle assemblée. Pourtant, Blaise Louembè a été désigné à la tête du parti lors d’un congrès organisé sans l’aval de son prédécesseur. « Tout cela est contraire aux textes du parti », a-t-il déclaré, soulignant que certains responsables du PDG lui avaient pourtant assuré leur loyauté avant de se précipiter au Palais présidentiel pour entériner la nouvelle direction.
Cette nomination, perçue comme une rupture avec l’ère Bongo, s’inscrit dans une dynamique plus large de restructuration du PDG, qui semble vouloir tourner la page des années Ali Bongo et se redéfinir sous une nouvelle orientation. Mais cette transition, opérée sans consensus clair, met en lumière une crise interne qui pourrait fragiliser davantage l’ancien parti dominant du Gabon.
Le PDG en quête d’un nouveau cap
Historiquement, le PDG a toujours été un instrument politique au service du pouvoir en place. Sous Omar Bongo, puis sous Ali Bongo, il a incarné la continuité d’un système où le parti et l’État ne faisaient qu’un. Toutefois, la chute d’Ali Bongo en août 2023, à la suite du coup d’État mené par le général Brice Clotaire Oligui Nguema, a marqué un tournant. Depuis, le parti peine à retrouver une identité claire et une cohésion interne.
La nomination précipitée de Blaise Louembè, ancien ministre et figure du PDG, semble répondre à une volonté d’émancipation de l’influence d’Ali Bongo. Mais cette décision, perçue par certains comme une manipulation politique, pourrait aussi accentuer les divisions au sein du parti. En effet, plusieurs cadres du PDG restent attachés à l’ancien président, tandis que d’autres souhaitent une rupture nette avec le passé pour aligner le parti sur la nouvelle dynamique politique du pays.
Un héritage politique en péril
L’un des enjeux majeurs de cette recomposition est l’héritage politique d’Ali Bongo. Contrairement à son père, Omar Bongo, qui avait su maintenir un équilibre entre les différentes factions du PDG, Ali Bongo a vu son influence s’éroder rapidement après sa destitution. Sa récente prise de parole traduit une volonté de reprendre le contrôle du parti ou, à tout le moins, d’empêcher son effacement total.
Mais cette ambition se heurte à une réalité politique implacable : le PDG d’après août 2023 ne peut plus être celui d’avant. Le contexte a changé, et le parti est désormais contraint de se redéfinir sous la pression d’une transition politique inédite au Gabon. Dès lors, la question centrale reste la suivante : le PDG peut-il survivre à la déchéance de la famille Bongo, ou est-il condamné à se réinventer sans son ancien leader ?
Entre crise et opportunité : quel avenir pour le PDG ?
Le PDG est aujourd’hui à la croisée des chemins. Soit il parvient à se restructurer en trouvant un consensus entre ses différentes factions, soit il sombre dans une crise profonde qui pourrait précipiter son déclin. La nomination contestée de Blaise Louembè, loin d’être un simple jeu de chaises musicales, illustre les tensions qui minent le parti.
L’enjeu dépasse la seule personne d’Ali Bongo : il s’agit de la survie d’un parti qui, malgré ses nombreuses controverses, a façonné la politique gabonaise depuis plus de cinq décennies. Son avenir dépendra de sa capacité à gérer cette transition sans tomber dans les travers des luttes intestines. Dans ce contexte, la question du respect des textes et de la légitimité des décisions prises sera déterminante pour restaurer la crédibilité du PDG auprès de ses militants et de l’opinion publique.
Si cette crise est mal gérée, elle pourrait marquer la fin d’une époque et sceller le déclin irréversible du PDG. À l’inverse, une réforme en profondeur, menée avec transparence et cohérence, pourrait lui permettre de renaître sous une nouvelle forme. Reste à savoir si les dirigeants actuels auront la lucidité et le courage nécessaires pour relever ce défi.
Times Infos
Par Amir Baron.