Alors que le Gabon amorce une période de transition sous l’impulsion des nouvelles autorités militaires, la jeunesse du département du Ntem, à Bitam, semble plus que jamais déterminée à jouer un rôle central dans la recomposition du paysage politique local. Longtemps marginalisée par une vieille garde politique issue du Parti Démocratique Gabonais (PDG), cette nouvelle génération entend rompre avec un système qu’elle juge archaïque et confisqué par des élites qui ne répondent plus à ses aspirations.
Un point de non-retour pour la jeunesse de Bitam
Sous la direction de figures émergentes telles que l’ancien troisième Maire adjoint, Jack Aubin Mbeang Ondo, la jeunesse de Bitam prépare une offensive politique d’envergure pour dénoncer ce qu’elle appelle « l’esclavage politique » dans lequel elle est maintenue. Selon eux, malgré le coup de force militaire qui a mis fin à des décennies de domination du régime Bongo, peu de choses ont réellement changé dans la région. Le contrôle politique local reste encore largement entre les mains des mêmes acteurs, issus du PDG, ce qui alimente un sentiment de frustration et d’injustice chez les jeunes.
Face à cette situation, la jeunesse de Bitam a décidé de prendre son avenir en main en organisant un point de presse pour dénoncer publiquement la continuité d’un système qu’elle souhaite voir disparaître. Cette mobilisation marque un tournant, non seulement dans le département du Ntem, mais potentiellement dans tout le Gabon, où la question du renouvellement de la classe politique devient de plus en plus pressante.
Un paysage politique en ébullition
Le département du Ntem est aujourd’hui à la croisée des chemins. Depuis l’arrivée au pouvoir du Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI), beaucoup espéraient voir des changements significatifs dans les pratiques politiques locales. Cependant, un an après cette rupture supposée, les anciennes figures du PDG continuent de dominer la scène. Pour de nombreux jeunes, cette situation ressemble à un retour au statu quo, comme si les efforts de libération n’avaient jamais eu lieu.
L’un des événements marquants de ce mécontentement croissant a été la récente grande réunion de l’Association OSSIMANE à Bitam. Au lieu d’être un moment de rupture avec le passé, cette rencontre a été perçue par la jeunesse comme un énième retour des « reliques du PDG ». La mise en place du nouveau bureau de l’association a ravivé les tensions, particulièrement en raison de l’exclusion de figures influentes et respectées par les jeunes, telles que Jack Aubin Mbeang Ondo ou encore Durant Angone Ella, ancien Directeur de cabinet au ministère des Transports et conseiller municipal.
Un appel à la renaissance politique
La jeunesse du Ntem réclame aujourd’hui un véritable renouveau politique. Pour eux, l’heure est venue de tourner la page de l’ancien système et de faire place à une nouvelle génération de dirigeants capables de répondre aux défis contemporains. Ils refusent désormais de se contenter de rôles subalternes ou symboliques, souvent réduits à de simples « porteurs de sac » pour les barons politiques du PDG. Cette nouvelle génération aspire à occuper des positions de décision, à être partie prenante des discussions qui concernent l’avenir de leur localité et du Gabon dans son ensemble.
Le point de presse qu’ils s’apprêtent à tenir sera suivi avec beaucoup d’intérêt, tant au niveau local que national. Cette démarche pourrait constituer le premier acte d’une série de mobilisations visant à bouleverser l’ordre établi et à imposer un véritable renouvellement de la classe politique dans le département du Ntem. Ce désir de rupture est d’autant plus renforcé par le sentiment d’urgence qui anime ces jeunes, convaincus que leur avenir est en jeu et que les vieilles méthodes ne suffisent plus.
Une association à contre-courant ?
L’Association OSSIMANE, créée par Aurélien Mintsa Mi Nguema, s’est retrouvée au cœur de la tourmente. Bien que l’association ait affiché son soutien aux actions du CTRI, sa décision de composer son bureau avec d’anciens cadres du PDG a jeté un froid. Comment une association censée incarner le renouveau politique peut-elle s’appuyer sur des « étoiles déchues » du PDG, s’interrogent les jeunes ? Ce choix semble paradoxal, et il est perçu par certains comme une trahison des promesses de changement faites lors de la transition.
Cette incompréhension entre les jeunes et les dirigeants actuels de l’OSSIMANE met en lumière un fossé générationnel et idéologique. Tandis que les anciens misent sur la continuité et l’expérience, la jeunesse réclame du sang neuf et une rupture nette avec un passé qu’elle juge responsable de l’état actuel du Gabon.
Un défi pour l’avenir du Gabon
La situation à Bitam est le reflet d’une dynamique plus large qui traverse aujourd’hui le Gabon. Dans de nombreuses régions du pays, la jeunesse se réveille et réclame un rôle actif dans la gestion des affaires publiques. Le contexte de transition politique offre une opportunité unique pour que ces aspirations se matérialisent, mais il reste à voir si les autorités en place sauront répondre à cette demande croissante de changement.
Le défi pour le Gabon est désormais de réussir cette transition politique en intégrant les aspirations d’une jeunesse audacieuse et déterminée, tout en assurant la stabilité du pays. La révolte de la jeunesse de Bitam est peut-être un prélude à une transformation plus profonde du paysage politique gabonais, et les prochains mois seront déterminants pour mesurer l’ampleur de ce changement.
Times Infos
Par Arthur Asseko.