Gabon : Le PDG se dote d’une nouvelle équipe à la tête du parti, renaissance ou simple recyclage politique ?

Le 13ᵉ Congrès extraordinaire du Parti Démocratique Gabonais (PDG), tenu le 30 janvier 2025 à Libreville, a marqué un tournant dans l’histoire de cette formation politique. Écarté du pouvoir le 30 août 2023 par la junte militaire dirigée par le général Brice Clotaire Oligui Nguema, le PDG tente aujourd’hui de renaître de ses cendres avec une nouvelle direction incarnée par Blaise Louembè, élu Président du parti, et Angélique Ngoma, nouvelle Secrétaire Générale. Mais cette restructuration est-elle une véritable refondation ou simplement une continuité masquée de l’ancien régime ?

Une recomposition sous haute tension

L’éviction d’Ali Bongo Ondimba, qui dirigeait le PDG depuis la disparition de son père, Omar Bongo Ondimba, en 2009, a laissé un vide que le parti cherche à combler. L’élection de Blaise Louembè, un fidèle du clan Bongo et ancien ministre à plusieurs reprises sous ce dernier, questionne sur la réelle volonté du PDG de se réinventer. Peut-on parler de rupture quand les figures qui émergent sont les mêmes qui ont gouverné aux côtés de l’ancien président déchu ?

Par ailleurs, l’organisation de ce congrès s’est tenue dans un contexte de défiance généralisée. Certains cadres dudit parti politique et de nombreux Gabonais voient dans le PDG le symbole d’un système politique qui a échoué à répondre aux aspirations du peuple et pour d’autres, les instances du parti actuel ne respecteraient pas les statuts du PDG. Depuis la transition enclenchée par la junte militaire, l’opinion publique exprime un rejet massif des anciennes pratiques politiques, associées à la corruption et à la mauvaise gouvernance.

Un pari risqué à l’approche des élections présidentielles

L’élection présidentielle du 12 avril 2025, qui marquera la fin de la transition militaire, sera un test crucial pour le PDG. Le parti devra clarifier sa position : présentera-t-il Blaise Louembè comme candidat naturel, en conformité avec ses statuts, ou choisira-t-il de soutenir une éventuelle candidature du général Oligui Nguema, si celui-ci décidait de briguer la présidence ?

Le dilemme est de taille. D’un côté, s’en tenir à un candidat issu du PDG pourrait renforcer l’image d’un parti résolument ancré dans son passé, peinant à se moderniser. De l’autre, un alignement sur la candidature d’Oligui Nguema risquerait d’être perçu comme une tentative opportuniste de conserver une place au sommet de l’État, sans réelle remise en question de ses pratiques.

Le spectre d’un rejet populaire

Au-delà des tractations internes, le PDG devra convaincre une population profondément échaudée par plus de cinq décennies de domination politique. Les manifestations de joie qui ont suivi le coup d’État du 30 août 2023 ont témoigné d’un désir de changement. Dans ce contexte, le parti pourrait être confronté à un rejet massif lors des prochaines échéances électorales, sauf à opérer une transformation radicale, non seulement dans son discours, mais aussi dans ses pratiques et dans le choix de ses leaders.

Une transition sous haute surveillance

L’actuel chef de la transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, détient les clés du processus politique en cours. Après avoir mis en place un nouveau cadre électoral et organisé un référendum constitutionnel en novembre 2024, il pourrait être tenté de prolonger son emprise sur le pouvoir en se présentant à la présidentielle.

Si le PDG décidait de le soutenir, cela poserait la question de la sincérité du processus démocratique engagé depuis le coup d’État. Une telle alliance ne manquerait pas d’alimenter la méfiance de la communauté internationale et des forces d’opposition, qui réclament une véritable alternance.

Un avenir incertain pour le PDG

En fin de compte, la réémergence du PDG dans le paysage politique gabonais suscite plus d’interrogations que de certitudes. Le parti pourra-t-il convaincre qu’il incarne un renouveau crédible, ou sera-t-il perçu comme une simple mutation d’un système anciennement dominant, cherchant à préserver ses intérêts sous un nouveau visage ?

Alors que les mois à venir s’annoncent décisifs, la scène politique gabonaise reste plus incertaine que jamais. Une chose est sûre : les Gabonais observeront avec attention les choix du PDG et de la transition militaire, déterminés à ne pas revivre les erreurs du passé.

Times Infos

Par Nancy Nguema.

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