Afrique du Sud – Rwanda : vers une escalade militaire en RDC ?

La ministre sud-africaine de la Défense, Angie Motshekga, a adressé une mise en garde explicite au Rwanda, avertissant que toute attaque contre les troupes sud-africaines déployées en République démocratique du Congo (RDC) serait considérée comme une déclaration de guerre. Cette prise de position radicale, relayée par Times Live ce 30 janvier, traduit la gravité des tensions croissantes dans l’est congolais et soulève des interrogations sur les risques d’un conflit élargi dans la région des Grands Lacs.

Une déclaration qui marque un tournant

L’implication de l’Afrique du Sud dans le bourbier sécuritaire congolais n’est pas nouvelle, mais le ton employé par Pretoria signale une évolution préoccupante. La déclaration de Motshekga fait écho aux propos du président Cyril Ramaphosa, qui avait déjà prévenu Kigali que toute attaque contre le contingent sud-africain serait perçue comme un acte de guerre.

Ce positionnement marque un durcissement notable de la diplomatie sud-africaine, qui jusqu’à présent privilégiait un rôle de médiateur dans les conflits régionaux. En tant que membre influent de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), l’Afrique du Sud s’est engagée aux côtés du gouvernement congolais pour contrer la menace posée par le M23, groupe rebelle accusé par Kinshasa d’être soutenu par le Rwanda.

Une tension régionale à son paroxysme

Les relations entre Pretoria et Kigali ont longtemps été marquées par des frictions diplomatiques, exacerbées par des accusations mutuelles d’ingérence. L’Afrique du Sud avait déjà expulsé des diplomates rwandais en 2014, soupçonnant le Rwanda d’être impliqué dans des assassinats de dissidents rwandais sur son sol. L’actuelle montée en tension autour de la RDC risque d’aggraver ces tensions historiques et de provoquer un face-à-face militaire inédit entre les deux nations.

Sur le terrain, la situation est de plus en plus explosive. Les affrontements entre les forces armées congolaises (FARDC), appuyées par la SADC, et les rebelles du M23 ont déjà fait de nombreuses victimes et déplacé des milliers de civils. L’intervention de la force régionale sud-africaine visait initialement à stabiliser la région, mais elle pourrait désormais se transformer en un théâtre d’affrontements entre États, avec le Rwanda comme adversaire direct.

Un risque de conflit régionalisé

Si une confrontation ouverte devait éclater entre l’Afrique du Sud et le Rwanda, les conséquences seraient désastreuses pour la RDC et au-delà. La région des Grands Lacs est déjà marquée par une instabilité chronique, où s’entremêlent rivalités ethniques, enjeux économiques et luttes d’influence entre puissances africaines et internationales.

Un affrontement militaire entre Pretoria et Kigali pourrait également fracturer davantage les organisations régionales, notamment la SADC et l’Union africaine, en mettant à l’épreuve leurs mécanismes de gestion des conflits. La SADC, en s’engageant militairement aux côtés de Kinshasa, prend un pari risqué : en cas d’attaque rwandaise, elle pourrait être contrainte d’intensifier son intervention, entraînant une escalade difficile à contenir.

Quelle issue possible ?

Dans ce climat tendu, la diplomatie devra jouer un rôle clé pour éviter une guerre ouverte. L’Union africaine, qui peine déjà à trouver une solution au conflit en RDC, doit intensifier ses efforts de médiation entre Pretoria et Kigali pour empêcher une dérive belliqueuse.

Le positionnement de l’Afrique du Sud en tant que puissance militaire sur le continent pourrait également influencer d’autres États à se positionner dans ce conflit. L’Angola, qui a déjà joué un rôle de médiateur entre Kinshasa et Kigali, pourrait être amené à intervenir plus activement pour calmer les tensions.

En définitive, la déclaration de la ministre sud-africaine de la Défense constitue un avertissement sérieux et un signal fort à Kigali. Reste à savoir si le Rwanda prendra cela comme un simple coup de pression diplomatique ou comme le prélude à une confrontation militaire de grande envergure. Une chose est sûre : la crise dans l’est de la RDC est à un tournant critique, et son évolution pourrait redéfinir les rapports de force en Afrique centrale et australe.

Times Infos 

Par Cédric Baloch.

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