Le Gabon s’apprête à vivre une semaine décisive sur l’échiquier politique national. Alors que le processus de transition mené par la junte militaire dirigée par le Général Brice Clotaire Oligui Nguema avance à pas mesurés, une coalition improbable d’anciens alliés du régime d’Ali Bongo et de candidats malheureux à l’élection présidentielle d’août 2023 émerge. Ces figures contestataires dénoncent une manipulation présumée du nouveau code électoral, soulignant le risque d’une transition biaisée.
Un front hétéroclite, mais déterminé
Alain Claude Bilie By Nzé, dernier Premier ministre d’Ali Bongo, Ali Akbar Onanga Y’Obegue, ancien ministre influent, Albert Ondo Ossa, principal challenger du régime déchu, et Pierre Claver Maganga Moussavou, ancien candidat présidentiel, s’unissent dans un objectif commun : contester les bases juridiques des prochaines élections. Ces personnalités, souvent opposées par le passé, forment désormais un front critique face à la junte militaire. Leur conférence de presse, prévue ce 8 janvier 2025 à Libreville, est annoncée comme un rendez-vous stratégique visant à interpeller la communauté nationale et internationale.
Ce rassemblement témoigne de la recomposition du paysage politique gabonais, où anciens rivaux unissent leurs forces pour dénoncer un processus qu’ils estiment biaisé. Mais cette alliance est-elle réellement motivée par une volonté de défendre l’intérêt général ou par des ambitions politiques personnelles ? La question reste ouverte.
Le code électoral, symbole des batailles politiques
Au cœur des tensions, le nouveau code électoral cristallise les inquiétudes. Révisé par la junte au pouvoir, ce texte est présenté comme un outil pour garantir des élections transparentes et inclusives. Cependant, pour les figures contestataires, il reflète une volonté de contrôler les futures échéances électorales. Albert Ondo Ossa, qui revendique toujours la victoire de 2023, voit dans cette révision une manière d’entériner les injustices passées.
Le contexte est d’autant plus explosif que les institutions de transition peinent à dissiper les soupçons de favoritisme et de partialité. Si la junte espérait apaiser les tensions par une réforme électorale, elle semble au contraire avoir réveillé les frustrations accumulées. La conférence de presse annoncée pourrait marquer le début d’une confrontation directe avec le pouvoir militaire.
Une junte sous pression croissante
Pour le Général Oligui Nguema, cette montée au créneau des anciens acteurs politiques représente un défi majeur. Alors que le gouvernement de transition cherche à projeter une image de stabilité et d’inclusivité, ces accusations menacent de ternir son bilan. La critique d’un processus de transition opaque, combinée à une société civile de plus en plus vigilante, place la junte dans une position inconfortable.
La question demeure : le pouvoir militaire pourra-t-il répondre aux critiques sans perdre sa légitimité ? Toute tentative de museler ces voix contestataires risquerait de provoquer une réaction en chaîne, tandis qu’un dialogue pourrait affaiblir l’autorité de la transition.
Vers une confrontation inévitable ?
La tenue de cette conférence de presse, couplée aux ambitions affichées de ces anciens leaders politiques, met en lumière une polarisation croissante de la scène politique gabonaise. Si cette coalition parvient à mobiliser un soutien populaire significatif, elle pourrait bouleverser les plans de la junte et ouvrir la voie à une période d’instabilité.
En fin de compte, cette opposition soulève une question fondamentale : le Gabon est-il prêt à tourner définitivement la page des pratiques politiques du passé ? La réponse dépendra autant de la capacité de la junte à engager un dialogue constructif que de la sincérité des ambitions de ces contestataires. Pour l’instant, le pays reste suspendu à cette confrontation inédite, qui pourrait redéfinir les contours de sa transition politique.
Times Infos
Par Amir Baron.