Paul Biya : Prisonnier de son propre système à l’aube d’une nouvelle candidature à l’élection présidentielle d’octobre 2025

À 92 ans, Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, s’apprête à briguer un nouveau mandat lors de l’élection présidentielle d’octobre 2025 au Cameroun. Si cette décision pourrait être perçue comme un acte de résilience politique, elle reflète également les failles d’un système profondément dépendant de son chef. Après plus de quatre décennies de gouvernance, cette nouvelle candidature soulève des interrogations cruciales : est-elle le fruit d’une volonté personnelle ou le signe d’un régime qui ne peut survivre à sa propre transition ?

Une gouvernance centralisée et fragilisée

Depuis son accession au pouvoir, Paul Biya a bâti un système hyper-centralisé, où les décisions majeures émanent directement de sa personne. Ce modèle a certes permis une certaine stabilité, mais au prix d’un affaiblissement des institutions. Les mécanismes de renouvellement politique, essentiels à toute démocratie, ont été étouffés, laissant le Cameroun sans alternative claire au sommet de l’État. Ce vide institutionnel complique toute perspective de transition ordonnée, rendant le régime vulnérable à des luttes internes dès que son pilier central vacille.

Un réseau d’intérêts en jeu

La longévité du règne de Paul Biya repose en grande partie sur les élites politiques, économiques et militaires qui gravitent autour du pouvoir. Ces groupes, souvent perçus comme bénéficiaires directs du statu quo, ont un intérêt stratégique à maintenir le système en place. En conséquence, toute tentative de départ ou de réforme profonde est susceptible de rencontrer une résistance farouche, non seulement de l’opposition, mais également au sein même de l’appareil d’État. Ce verrouillage institutionnel transforme le président en prisonnier de son propre système, incapable de céder la place sans risquer un effondrement de l’édifice qu’il a construit.

Un contexte sociopolitique explosif

Le Cameroun traverse des crises multiples qui compliquent davantage la donne. La situation sécuritaire reste préoccupante, notamment dans les régions anglophones où les tensions perdurent. Par ailleurs, une jeunesse désabusée, qui représente plus de la moitié de la population, aspire à un véritable changement. La déconnexion entre les attentes populaires et la réalité du pouvoir exacerbe les frustrations, créant un climat propice à des mouvements sociaux de plus en plus audibles. Dans ce contexte, la candidature de Paul Biya risque d’être perçue comme un affront à ces aspirations de renouveau.

Un avenir incertain

Si Paul Biya parvient à se maintenir au pouvoir en 2025, le Cameroun risque de prolonger un cycle de stagnation politique et économique. Mais l’autre scénario, celui d’une transition forcée ou désordonnée, pourrait s’avérer tout aussi périlleux. L’absence d’un successeur clair et d’un cadre institutionnel solide menace de plonger le pays dans une période d’incertitude, voire de chaos.

Le dernier chapitre d’un long règne ?
La candidature de Paul Biya est un symbole des dilemmes auxquels font face de nombreux régimes autoritaires à long terme : comment garantir une transition sans bouleversement lorsqu’un système repose presque exclusivement sur une seule personne ? Le Cameroun, à la croisée des chemins, doit urgemment réfléchir à cette question. Car plus le statu quo persiste, plus le risque d’une transition douloureuse se profile à l’horizon.

La candidature de Paul Biya en 2025 ne représente pas seulement une nouvelle étape de sa carrière politique, mais aussi un test décisif pour l’avenir d’un pays qui peine à se libérer des chaînes d’un système à bout de souffle.

Times Infos 

Par Patrick Kindé.

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