RDC : Les flammes de Kibumba, symbole d’une crise oubliée

Dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), la guerre ne fait pas de bruit pour ceux qui ne la vivent pas. Pourtant, à Kibumba, à quelques kilomètres de Goma, le fracas des armes entre l’armée congolaise (FARDC) et les rebelles du M23 résonne comme un écho lancinant d’une crise régionale qui ne trouve pas de fin. Les civils, pris au piège de ces affrontements, fuient en masse, transformant les routes poussiéreuses en couloirs de désespoir.

Une crise humanitaire sous-estimée

Depuis la reprise des combats en 2021, le M23, groupe rebelle accusé d’être soutenu par le Rwanda, a ravivé la terreur dans le Nord-Kivu. À Kibumba, des centaines de familles ont abandonné leurs maisons pour se réfugier à Goma, ville déjà saturée par des vagues successives de déplacés. Les camps de fortune s’étendent, mais les moyens logistiques et humanitaires, eux, s’amenuisent. La faim, le manque d’eau potable et les conditions sanitaires désastreuses transforment cette situation en une véritable bombe humanitaire.

Les déplacés racontent des scènes d’horreur : villages incendiés, exécutions sommaires et pillages systématiques. « Nous sommes laissés à nous-mêmes. Où est le monde pour voir ce que nous vivons ? » interroge Samuel, un père de famille ayant marché trois jours pour atteindre Goma. Pourtant, malgré ces appels à l’aide, l’attention internationale semble focalisée ailleurs, reléguant la crise congolaise à l’ombre des priorités mondiales.

Une diplomatie inefficace et des rivalités régionales

Les efforts de médiation, notamment sous l’égide de l’Union africaine et des initiatives comme le processus de Luanda, n’ont pas permis d’endiguer les violences. Le conflit, largement alimenté par des rivalités régionales, reflète une lutte d’influence où Kigali est accusé de soutenir le M23 pour des raisons économiques et stratégiques. De son côté, Kinshasa cherche à mobiliser un soutien international tout en tentant de restaurer la souveraineté dans une région minée par l’instabilité depuis des décennies.

Mais les accords sur le papier se heurtent à une réalité différente sur le terrain. Les cessez-le-feu sont systématiquement violés, et les populations locales voient en ces négociations un théâtre diplomatique déconnecté de leurs souffrances quotidiennes.

L’échec de la communauté internationale

Alors que la situation empire, la communauté internationale reste timide. Les Nations unies, via leur mission en RDC (MONUSCO), semblent incapables d’assurer une protection efficace des populations civiles. Loin de renforcer leur présence, plusieurs États membres envisagent une réduction des effectifs de la mission, ce qui pourrait aggraver encore la situation.

Pendant ce temps, les grandes puissances ferment les yeux sur les enjeux stratégiques de cette crise. Avec des ressources naturelles vitales pour les industries technologiques, le Nord-Kivu devrait pourtant être au cœur des préoccupations. Mais les intérêts économiques de plusieurs multinationales dans l’extraction illégale de ces minerais créent une dynamique où le statu quo profite à certains, au détriment des Congolais.

Une nation à la croisée des chemins

Face à cette situation, la RDC se retrouve à un tournant. L’État congolais doit renforcer ses institutions, sécuriser ses frontières et engager un dialogue inclusif avec les communautés locales. Mais cela nécessite un soutien international massif et sincère, ainsi qu’une volonté réelle de mettre fin à cette crise.

En attendant, les civils continuent de souffrir, oubliés du monde. Kibumba n’est pas un cas isolé, mais le symbole d’un drame plus large, où des millions de vies sont sacrifiées sur l’autel des intérêts géopolitiques et économiques. Combien de temps faudra-t-il encore pour que le cri de ces populations soit entendu ?

Times Infos 

Par Patrick Kindé.

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